Vincent Fournier artiste Valais Sion

Ittingen Vincent Fournier
Ittingen Vincent Fournier
Ittingen Vincent Fournier
Ittingen Vincent Fournier
Ittingen Vincent Fournier
Ittingen Vincent Fournier

L’échelle du paradis, chartreuse d’Ittingen 2020

 

Titre de l’œuvre : « incline les cieux et descends »    ps 144, 5

Matériaux : mélèze recouvert de peinture industrielle, incrustation de verre, crayon.

185 planches, 70x16x2,5 cm découpées et ajustées aux marches.

 

L’idée majeur est de permettre aux passants de rejoindre visuellement l’immensité du ciel à travers les vignes par une ligne bleu-claire. Cette ligne est formée des 185 contremarches peintes en différents bleus. Comme l’escalier grimpe fortement jusqu’au sommet de la colline, les peintures semblent s’ajouter l’une à l’autre en dessinant un ruban bleu à travers les vignes.

 

Si l’église est le lieu sacré de la communion des hommes avec Dieu, le lieu du rassemblement de la prière, le monde où nous vivons habituellement peut devenir aussi le lieu de la rencontre avec Dieu : Nous pouvons rejoindre Dieu où que nous soyons. L’installation devient ainsi trait d’union visuel entre le ciel et la terre.

 

Le titre « incline les cieux et descends », emprunté au psaume 144, est une prière demandant à Dieu de descendre à notre rencontre. Le ciel au sommet de la colline semble s’incliner et « couler » à travers les vignes.

 

La seconde idée est celle des couleurs de la liturgie. Si l’on multiplie les 185 marches par 2, on obtient 370, soit un peu plus du nombre de jours d’une année.

 

Donc si une marche représente 2 jours, on peut répartir aisément la durée des temps liturgiques en évoquant les couleurs de ceux-ci. L’emplacement des fêtes solennelles et celles des saints se calculent aussi facilement.

 

La 3ème marche du chemin montre ste Wyborada et une ligne verticale blanche qui symbolise le 4ème dimanche de Pâques, avec la date du 3 mai. On commence le chemin avec la couleur blanche du temps pascal. La couleur rouge de la pentecôte interrompt cette suite de blanc. On passe ensuite au vert du temps ordinaire. Etc.

 

Les couleurs liturgiques sont le blanc pour les fêtes et les temps de Noël et Pâques ainsi que pour la fête des saints, le vert pour le temps ordinaire, le violet pour les temps de l’avent et de carême, le rouge pour la pentecôte, le dimanche des rameaux, le vendredi saint et la fête des martyres. Deux dimanches sont roses : le 3ème dimanche de l’avent et le quatrième de carême : Gaudete et Laetare : réjouissez-vous.

 

Les dimanches sont signalés par une ligne verticale.

 

De petites figures discrètes peuplent l’échelle du paradis. Ce sont les saints. Ils nous rappellent que nous ne sommes pas seuls sur ce chemin qui monte vers le ciel. Des incrustations de verre colorés rythment également la montée : ils signalent avec les dessins qui les accompagnent les fêtes chrétiennes.

 

De courtes phrases tirées de la bible où d’écrits spirituels peuvent interpeler ceux qui les lisent.

 

La troisième idée de l’installation est l’échelle du paradis de Guigues le chartreux. Dans un court texte, ce chartreux mort en 1193 nous indique les quatre échelons qui permettent aux contemplatifs de s’unir à Dieu, but de leur vie de silence et de solitude. Ces quatre échelons sont lectio, meditatio, oblatio, contemplatio. Lecture de la bible, méditation de celle-ci, prière et contemplation. On découvre en montant quatre échelons rouge, jaune, vert et bleu. Une simple phrase résume chacune de ces activités spirituelles.

 

Le chemin se termine de manière heureuse, puisque les dernières marches nous conduisent à travers le temps du carême par la passion vers la résurrection du Christ.

 

Si nous ne sommes pas au ciel en haut de la colline, une dernière inscription latine nous rappelle une vérité profonde de la mystique chrétienne : Vere Dominus est in loco ist hoc genz & vib. : En vérité, le Seigneur est en ce lieu. Cette phrase du chapitre 28 de la genèse, on peut la lire aussi dans le plafond de l’église du monastère chartreux.

 

L’installation « incline les cieux et descends » rejoint par cette inscription finale le cœur du couvent et en donne l’intention profonde : Dieu est partout.

 

Vincent Fournier, chartreuse d’Ittingen, avril 2020